«Tu sais quoi?» lui demandai-je en posant ma tête sur sa poitrine pour écouter son coeur reprendre lentement son rythme habituel. J'aime poser ma tête là, pour respirer l'odeur de sa peau, qui change après l'orgasme. Ah! s'il m'était possible de la mettre en bouteille, cette odeur-là!

- Quoi? répondit-il, curieux.

- Ce doit être un peu ça, le paradis, répondis-je, rêveuse, en regardant le soleil se coucher à nos pieds.

- Han han, approuva-t-il. (Je sais, il est parfois si éloquent!)

Un chant d'oiseau brisa le silence.

- Quand je serai vieille et ratatinée, je me souviendrai de ce moment. C'est si...

- Bien sûr que tu vas t'en souvenir, m'interrompit-il, tu n'as pas le temps d'oublier d'ici deux semaines...

Il n'y a jamais eu de nous, dans notre histoire.
Toi. Moi. Mais pas de nous...

Laisser sortir les mots, bruts, vrais.

Tu me bouleverses, tu sais?
Tu débarques dans ma vie avec tes mots et tes yeux, sans avertir...
Ces yeux...
Tu triches... Je n'ai jamais su résister à des yeux comme les tiens.

Et tu me dis que j'aurais pu être celle qui...
Tu joues de tes charmes.
De tes mains.
De tes mots...
De tes sourires...
De tes silences.

Tu m'ensorcèles.

Tu me bouscules.
Me tourbillones.
M'étourdis.

Encore...

Une si belle journée d'automne. J'ai toujours aimé cette période de l'année. Durant cette saison, on dirait que la nature semble vouloir nous rendre ivres tant elle stimule les sens...

Les couleurs, sous les rayons du soleil, semblent plus vives, plus intenses qu'à l'ordinaire.
Bleu. L'immensité d'un ciel sans nuage. Le fleuve, tout près. Si près...
Bleu... Mes yeux qui le regardent amoureusement. Mon chandail de laine.
Vert. Les champs, l'herbe, les feuilles des arbres.
Rouge. Les pommes, mes joues, ses lèvres...
Brun. Le tronc du pommier contre lequel il m'a poussée pour m'embrasser. Mes boucles qui volent au vent.
Blanc. Ma peau, sous le soleil.

Et l'odeur de la terre, chauffée par ce soleil du début de l'automne.
Les senteurs du verger, celle du fleuve.
L'odeur de sa peau, dans son cou.
Le parfum de mes cheveux, dans lesquels il enfouit son nez.

Le bruit des feuilles mortes, sous nos pieds.
Les enfants qui crient, là-bas, plus loin.
Le son de sa voix...
Son souffle près de mon oreille.
Mon coeur qui bat...

L'écorce rugueuse dans mon dos.
La laine sur ma peau.
La douceur de ses lèvres.
Son haleine, sur mes lèvres, dans mon cou...
La chaleur de ses mains, sous mon chandail, qui cueillent mes seins comme deux fruits mûrs...
Ses doigts qui se perdent en caresses soyeuses.
Son corps, qu'il presse contre le mien.

Et le goût des pommes, que j'ai cueilli sur ses lèvres...

J'aime ces moments, après l'amour, où nous demeurons tous les deux, en silence. Comme si nous avions peur, en ouvrant la bouche, de laisser échapper un peu de ce plaisir que l'on cherche à contenir et à retenir, le plus possible... Comme si nos corps savaient se parler, dans un langage étrange de frissons, d'effleurements et de caresses...

Sa tête légèrement posée sur mon ventre, il traçait, du bout des doigts, des arabesques sur la peau délicate au-dessus de mon pubis. Ces entrelacs qu'il enroulait autour de mon nombril étaient si empreints de tendresse que j'en fus chavirée... "Tu es belle", me disaient ses doigts. Sa bouche a murmuré, sur mes lèvres, un "Je t'aime" humide... Lorsque ses mains ont glissé sous mes fesses, mes reins se sont cambrés pour mieux crier mon envie de lui...

Dans le silence, brisé seulement par le froissement des draps et le bruit de mon souffle qui s'affolait, sa langue m'a raconté une délicieuse histoire d'amour.

À travers ses mots, je me suis vue. Belle... Intense.... Ardente....

Et je me suis reconnue...

Il écrit la pluie, et elle coule sur ma peau. Il dit la chaleur, et elle naît au creux de mon ventre... Il évoque l'humidité, et elle coule entre mes cuisses. Lorsqu'il décrit le souffle de l'air, je frissonne. Il raconte ma peau, et je frémis... Il parle de caresse, et je déborde. S'il parle de plaisirs, je tressaille... Il fait l'amour avec mes mots, et je jouis...